Audace, poésie et profonde réflexion existentielle sur la foi, les traditions, la destinée, la vie et la mort avec Tu mourras à 20 ans, qui sort ce mercredi 12 février. Premier long-métrage du soudanais Amjad Abu Alala d’une grande maîtrise technique et artistique qui lui a valu un Lion du futur (meilleur premier film) à la Mostra de Venise, cette fable initiatique nous plonge au cœur d’une malédiction où tout avenir est exclu… une thématique qui ressemble vite à une métaphore puissante bien plus large que la simple histoire racontée, comme un hymne à la liberté.
Soudan, province d’Aljazira, de nos jours. Peu après la naissance de Muzamil, le chef religieux du village prédit qu’il mourra à 20 ans. Le père de Muzamil ne peut pas supporter cette malédiction et quitte le foyer. Sakina élève alors seule son fils, le couvant de toutes ses attentions. Un jour, Muzamil a 19 ans…
Qu’est-ce que cela fait d’être vivant, mais en même temps mort de l’intérieur ? Comment peut-on vivre tout en anticipant la mort, respirer tout en sachant à chaque seconde que la mort est au coin de la rue ? Tu mourras à 20 ans d’Amjad Abu Alala aborde la question du poids de la croyance. C’est un regard sur la foi, ou plutôt sur son dilemme, dans une région particulièrement marquée pour sa dévotion aveugle à tout ce qui est spirituel. La foi nous rend-elle, en quelque sorte, plus vivants et plus attentifs à ce qui nous entoure ? Ou bien nous tire-t-elle en arrière lorsque, au nom de la piété ou de la tradition, nous perdons notre sens de l’aventure, notre volonté d’explorer la vie et l’amour pour donner la priorité aux opinions de la société qui nous entoure, à l’approbation des parents et que nous succombons à la pression de nos pairs ?
Ce sont là quelques-unes des questions très difficiles, et tout aussi complexes, qu’Abou Alala explore dans son premier long métrage. Tout en partageant certaines similitudes thématiques avec un autre premier film arabe remarquable (Le Miracle du saint inconnu d’Alaa Eddine Aljem, dont la première mondiale a eu lieu lors du dernier festival de Cannes dans la Semaine de la Critique), Tu mourras à 20 ans est une œuvre plus dense et plus complexe, filmée avec une photographie lumineuse, une bande-son obsédante et une approche étonnamment poétique qui la rend à la fois extrêmement réfléchie et pleine de fraîcheur candide, même si quelques scènes sont sans doute légèrement trop longues.
Une mère, Sakina (magnifiquement jouée dans une performance presque muette par l’actrice Islam Mubarak), se rend à un rituel religieux dans l’espoir de recevoir la bénédiction d’une des figures religieuses du village pour son fils nouveau-né. Lorsqu’un incident se produit sur place, on pense que le garçon est associé à une malédiction qui ne le fera vivre que jusqu’à l’âge de 20 ans. Incapables de se débarrasser de la malédiction, malgré leur extrême dévotion, la mère et le fils partagent une vie qui s’apparente davantage à la mort puisqu’ils comptent les jours jusqu’à ce que Muzamil atteigne l’âge de 20 ans, et quitte donc ce monde. En anticipant la mort pendant ces années, ils se transforment en morts-vivants dont la maison ressemble à une tombe et dont les cœurs ne font que fonctionner automatiquement. Au fond d’eux-mêmes, ils sont partis depuis longtemps, sans aucune volonté de vivre, sans aucun espoir en vue.
Ce qui rend le film d’autant plus unique et certainement stimulant pour tous ceux qui refusent l’abnégation comme mode d’existence, c’est ce choix de prendre un protagoniste délibérément passif et le placer dans diverses situations qui cimentent encore plus sa réticence à changer un destin qui lui est imposé. Ainsi, lorsque le changement se produit vers la troisième partie du film, dans un final vraiment magnifique, on comprend qu’Abu Alala n’est pas intéressé par un cadre narratif conventionnel où un personnage est soudainement éclairé pour changer de chemin, ni par une catharsis dramatique qui change sa vie. En représentant une soumission extrême à la religion, au destin et aux superstitions, le réalisateur met le spectateur au défi de se connecter avec un tel personnage passif. Pour certains, cela peut être frustrant. Mais la réalité est ainsi et sans doute bien pire encore avec tant de personnes complètement enfermées dans une vie qu’ils n’ont pas choisie, façonnées par des destins scellés. C’est d’ailleurs ce qu’explique Abu Alala : « Le film montre comment une forte croyance peut affecter la vie des gens – et la façon dont cette foi peut être instrumentalisée politiquement. Le gouvernement soudanais d’Omar el-Béchir a utilisé l’Islam pour faire taire le peuple – quand quelqu’un dit « C’est la parole de Dieu », plus personne ne peut parler… Mon film est une invitation à être libre. Rien ni personne ne peut vous dire : voici votre destin, il est écrit quelque part. C’est à vous de décider ce que sera votre vie. »
Pour Muzamil, son réveil arrive tard mais il est d’autant plus crédible qu’il sort enfin de cette prison invisible de superstitions et de croyances imposées. La scène finale, qui hante par sa beauté, sa musique et sa cinématographie, dit tant de choses sur l’état du Soudan en ce moment, d’autant plus que le pays se réveille d’une règle islamique qui a dépouillé des millions de personnes de leur bien le plus important : la vie. Ce n’est pas la pauvreté ni le manque de moyens qui ont fait mourir des millions de Soudanais de l’intérieur, affirme Abu Alala, mais c’est le manque d’action, l’absence de remise en cause du statu quo, l’incapacité ou la réticence de celui-ci à remettre en cause les notions établies et les figures autoritaires de la religion et du pouvoir très respectées. Et la course finale de Muzamil dans le film est une métaphore du geste du peuple soudanais en ce moment-même. Alors nous pouvons en rester, bien sûr, à cette explication et ce contexte politique et religieux du Soudan et de quelques autres pays plus ou moins identiques, mais la force de Tu mourras à 20 ans est aussi, par une lecture plus large encore, de pouvoir interpeller chacun sur son existence, sur son rapport à sa propre vie et à sa relation aux autres.
Un premier long métrage complexe, étonnant et sophistiqué d’Amjad Abu Alala qui est une réalisation majeure pour le cinéma soudanais mais qui sait aussi utiliser un langage universel. Un premier long métrage plein d’assurance qui ressemble déjà à un accomplissement.
« Une vie cachée », le nouveau long métrage de Terrence Malick, présenté dans la Compétition du Festival de Cannes est un chef d’œuvre d’une dimension, ou plutôt d’une puissance, spirituelle et cinématographique rare. Une ode déchirante à la foi, au travers de l’histoire (vraie) de l’autrichien Franz Jägerstätter.
Synopsis : Inspiré de faits réels. Franz Jägerstätter, paysan autrichien, refuse de se battre aux côtés des nazis. Reconnu coupable de trahison par le régime hitlérien, il est passible de la peine capitale. Mais porté par sa foi inébranlable et son amour pour sa femme, Fani, et ses enfants, Franz reste un homme libre. Une vie cachée raconte l’histoire de ces héros méconnus.
Quand l’agriculteur autrichien Franz Jägerstätter (August Diehl) regarde vers le ciel et demande à Dieu de lui montrer un signe, de le guider, comment lui répond-t-il ? Par le grondement d’un orage au sommet des Alpes autour de sa bucolique ville natale de St Radegund ; le bruit du vent caressant les champs de blé autour du village ; la voix de sa merveilleuse femme Fani (Valerie Pachner qui mériterait le prix d’interprétation féminine…) et de leurs trois petites filles. Mais, une fois que la Seconde Guerre mondiale a éclaté et l’a plongé dans un monde sombre fait de prisons militaires, de tribunaux judiciaires, et d’un dictateur tout puissant… c’est le bruit de membres et de corps brisés qui résonnent sur les planchers ; l’écho des sirènes des raids aériens ; le terrible bruit des coups de feu. Dans une œuvre imprégnée par la question de la foi, la proximité mais aussi l’éloignement de l’humanité vis-à-vis de Dieu n’ont jamais été aussi pressants que dans Une vie cachée, ce récit historique sur un homme qui a refusé de prêter allégeance à Hitler, et qui a payé le prix ultime pour son défi.
Terrence Malick retrouve ici pour l’image, Jörg Widmer, directeur de la photographie déjà de Tree of life. Et ce sont ainsi de superbes grands angles qui construisent ce film mais avec un retour à une construction narrative linéaire et traditionnelle pour Malick par rapport à ses quatre dernières œuvres, tout en étendant son impulsion à donner autant de poids à la faune et aux bruits ambiants qu’aux préoccupations humaines. Avec une durée de 173 minutes, c’est l’œuvre la plus longue de Malick à ce jour, mais paradoxalement celle qui est sans doute la plus accessible à un large public.
Chrétien pacifiste et profondément sincère et engagé dans sa foi, l’aversion de cet homme pour une guerre qu’il considère injuste est si profonde qu’il ne peut se résoudre à jurer fidélité à Hitler et à l’Allemagne nazie à laquelle l’Autriche avait été annexée récemment. Et dans un village reculé où vivent une poignée de familles d’agriculteurs, de boulangers et de forgerons, ce n’est qu’une question de temps avant que le sentiment résolument anti-guerre et le refus de cet homme de rejoindre ses compagnons de front soient interprétés comme une trahison, un coup dans le dos aux nombreuses familles dont les fils ont déjà été envoyés au front, et ne reviendront peut-être jamais, porté en plus par un sentiment nationaliste grandissant.
« Qu’est-il arrivé à notre pays ? » s’interroge Franz et, en se réfugiant dans l’étreinte de son épouse Fani d’ajouter : « Les gens ne reconnaissent-ils pas le mal quand ils le voient ? ». Et jusqu’au bout, et à grands frais personnels, Fani soutient son mari, tandis que certains cherchent à épargner sa vie au détriment de son âme, comme Bruno Ganz, dans le rôle du juge du tribunal militaire, qui confronte Franz quelques minutes avant la sentence finale. « Ai-je le droit de ne pas faire ce qui est juste ? » répond le détenu en retour.
Une vie cachéedevient une invocation, l’appel déchirant d’un homme qui lutte pour préserver son humanité intacte alors que le monde autour de lui plonge plus profondément dans le mal et, pire encore, regarde le mal s’épanouir, s’étendre et se normaliser, sans bouger et sans être dérangé. Prière qui se tourne inlassablement vers Dieu… prière que fait aussi Fani avec une sincérité bouleversante, même quand les doutes s’immiscent…
L’État et l’Église sont également sourds aux inquiétudes de Franz, et également complices du crime. Car même lorsqu’il se tourne vers le clergé pour obtenir de l’aide, consultant notamment un évêque au sujet de sa décision de refuser de se joindre aux troupes si les autorités militaires le lui demandent, la réponse est un rappel terrifiant du devoir unique de se soumettre aux autorités. Pour sa part, Franz affirme :« Si Dieu nous donne le libre arbitre, nous sommes responsables de ce que nous faisons » et, tout aussi important, de « ce que nous ne faisons pas ».
La Seconde Guerre mondiale est un mal bien présent mais qui reste presque invisible. Il n’y a pas de champs de bataille, seulement ceux de blé… pas d’horreurs dans les camps de concentration, pas de raids dramatiques à minuit. Mais ne vous y trompez pas : C’est un film de guerre ; mais le combat qui fait rage ici est un combat interne, entre un chrétien et sa conscience. C’est une bataille qui se déroule donc à l’intérieur mais aussi autrement à l’extérieur, entre Franz et la foule qu’il affronte : les villageois qui ostracisent progressivement toute sa famille, et les soldats qui l’incarcèrent dès qu’il se présente à la caserne après son enrôlement, et qu’il refuse de prononcer le serment, se lançant dans un enfer asphyxiant de torture et d’isolement en prison. Regardant le fermier se diriger volontairement et sans relâche vers son destin tragique, montrant l’autre joue aux hommes qui l’humilient, le rabaissent et le torturent, Franz devient clairement une figure Christique. Alors qu’Une vie cachée entre dans sa dernière heure, la prison, le tribunal… le sentiment s’installe pour le spectateur d’être témoin de la Passion selon Malick.
L’histoire de Franz Jägerstätter nous interpelle aussi sur le risque d’une humanité qui a perdu la capacité à entendre parler le divin. « Un jour, je peindrai un vrai Christ », raconte Franz dans une scène de jeunesse, ou il discute avec un homme travaillant sur les fresques de l’église de Radegund, se plaignant de son incapacité à dépeindre la souffrance de Jésus au lieu des icônes plus tranquilles et pacifiques que les ecclésiastiques locaux recherchent. C’est peut-être un résumé subtil pour un film qui réussit judicieusement à être critique des institutions religieuses, tout en célébrant la foi comme quelque chose qui transcende, quelque chose de mystérieux à chérir, à laisser vivre au cœur de l’homme et à voir. Car Malick fait une vraie distinction critique entre la foi et la religion, soulignant l’échec de cette dernière – une institution humaine aussi faillible et corruptible que tout individu.
Ici, c’est le destin de l’âme d’un homme qui est en jeu, et près de trois heures d’écran ne semblent pas du tout excessives quand il s’agit de capturer le sacrifice de Franz, ostracisé, emprisonné, et finalement exécuté pour ses convictions. Et si le titre du film fait référence à une citation de la romancière George Elliot, quelle judicieuse idée de nous la retranscrire en image finale : « Si les choses ne vont pas aussi mal pour vous et pour moi qu’elles eussent pu aller, remercions-en pour une grande part ceux qui vécurent fidèlement une vie cachée et qui reposent dans des tombes que personne ne visite plus. »
Une vie cachée est vraiment une œuvre immense qui élève l’âme et qui touche au cœur comme un souffle de vie et d’espérance bienfaisant. Merci monsieur Malick !
Bien dommage que Sur le chemin de la rédemption ou First Reformed dans son titre original, le nouveau film de Paul Schrader, ne sorte en France qu’en format DVD à bas prix, sans passer par la case « Salles de Cinéma »… Remarqué pourtant dans de nombreux festivals et encensé par la critique internationale, le film ne bénéficiera donc pas d’une sortie nationale. Pourtant nous sommes bel et bien là devant, sans doute, l’un des grands films d’auteurs de cette année.
Toller, un ancien aumônier militaire, ravagé par la mort de son fils en Irak, conseille une jeune paroissienne, Mary et son mari, un écologiste radical. Cette nouvelle mission lui permet de redonner un sens à sa vie et lui donne l’espoir de pouvoir réparer les erreurs du passé.
Paul Schrader (scénariste notamment de Taxi Driver et Raging Bull) revient à la réalisation en optant pour un film tournée en 4/3 avec une approche sobre et dépouillée de tout artifice, en misant sur une certaine pureté des plans, et en se concentrant sur l’expérience mystique éprouvée par son personnage principal. Le film a ainsi certaines ressemblances flagrantes avec les œuvres de Robert Bresson, Ingmar Bergman ou encore de Tarkovski. Ressemblances revendiquées par le cinéaste puisque ces noms sont ses modèles avoués. Et par son approche scénaristique, Sur le chemin de la rédemption sera sans doute à rapprocher de l’excellent Silence de Martin Scorsese.
Si la mise en place peut sembler un peu longue, elle permet pourtant une montée en puissance exponentielle de la tension et du suspens. La trame du scénario se déroule alors en offrant une profondeur universelle à cette histoire atypique. Très clairement, le cinéaste nous gratifie là d’un message puissant qui colle avec son temps tout en évitant l’écueil du manichéisme. Son discours est riche, car aussi pétri de contradictions et donc d’interrogations qui ne peuvent qu’interpeller, que l’on soit croyant ou non. Schrader questionne ici la position de l’Église concernant plusieurs grands enjeux contemporains mais aussi face à des questions qui touchent à l’intime, et de façon équilibrée.
Un mot enfin sur le casting duquel ressort le très juste duo composé d’Ethan Hawke qui incarne le révérend Ernst Stoller en proie à la dépression et à de profonds questionnements et la paroissienne qui lui demandera de l’aide jouée par Amanda Seyfried, sans doute dans l’un de ses plus beaux rôles, et que l’on a aussi pu voir récemment dans un autre genre avec le deuxième opus de Mamma Mia.
Crise de foi, remise en question, dépression, suicide… mais aussi résilience, amour, optimisme, éthique… des mots qui résonne aussi puissamment que le film est fort, complexe, touchant et tout simplement beau… de riches arguments pour au moins acheter le dvd à moins de 10€ me semble-t-il.
Depuis leur formation en 1977 dans la ville galloise de Rhyl (sous le nom curieux de The Toilets qui deviendra judicieusement en 1981 The Alarm en hommage à leurs « grands frères » U2), The Alarm a vendu six millions d’albums et a réussi à enregistrer 17 singles dans le Top 50 au Royaume-Uni. On retiendra entre autres The Stand, Sixty-Eight Guns, Unsafe Building ou Where Were You Hiding When The Storm Broke. 2018 marque leur grand retour avec la sortie de Equals, un grand album pêchu et combatif qui fait un bien fou.
En 1991, Mike Peters, Dave Sharp, Eddie MacDonald et Nigel Twist, les membres d’origine, décident de se séparer pour permettre notamment à Mike et Dave de se lancer dans une carrière solo. Re-formation progressive du groupe en 1999, où un projet intitulé The Poppy Fields Bond leur a permis de publier cinq CDs en autant de mois en 2003, ce qui n’est pas une mince affaire. Mais Mike Peters devra traverser un certain nombre de fortes épreuves dans sa vie. Ayant guéri d’un cancer de la lymphe en 1996, une forme rare de leucémie lui a été diagnostiquée en 2005 et, après une première guérison, il fait une rechute en 2015. Pour ajouter à une situation déjà bien difficile, son épouse Jules, qui joue du piano et fait des chœurs pour le groupe, a ensuite été diagnostiqué d’un cancer du sein peu de temps après. Le groupe cesse alors toute activité pendant leurs traitements. Heureusement, ils sont maintenant en rémission et retrouvent ensemble The Alarm avec ce dernier album Equals, premier album depuis Direct Action en 2010 qui sent le combat, la lutte pour la vie, et la foi en Dieu.
Avec Two Rivers, premier titre de l’album, on retrouve immédiatement le grain et la passion dans la voix de Mike Peters. Une rythmique percutante comme The Alarm sait si bien le faire, une mélodie riche et l’apport de synthés plus pop même si l’essentiel tourne au son des guitares.
Puis Beautiful arrive dans le plus pur style du groupe. Et dans la mise en perspective de l’histoire personnelle de Mike, cette chanson devient un hymne au courage et à la vie en parlant de résilience, de gratitude coute que coute : “Tout ce que j’avais est parti… mais tout est magnifique ce soir”. Et ce combat pour la vie revient immédiatement derrière avec Coming Backwards où la voix de Billy Duffy de The Cult vient rejoindre celle de Mike avec brio. Puis Transatlantic qui commence en douceur avec une partie très mélodique et une voix plus douce, un piano et toujours une rythmique grandiloquente pour finalement se diriger vers un refrain explosif.
Et les titres s’enchainent, 11 au total, avec par exemple Peace Now qui fait référence à Another Brick in the Wall des Floyd et où l’harmonica se régale façon nostalgique de Sixty-Eight Guns. Une puissante chanson pacifiste interprétée à la Bono… « Pas de guitare dans la machine de guerre, mon ampli va noyer votre discours.Vous appelez aux armes, je ne vais pas acquiescer. Je frappe sur ma batterie au nom de la paix « . Et puis des sons électros s’ajoutent sur plusieurs titres sans faire perdre l’essence rock’n roll du son de The Alarm. Comme dans Thirteen Dead Reindeer avec un gimmick fait d’une boucle synthés rappelant certaines utilisations de Supertramp.
Mention spéciale au 9ème morceau, Cenotaph, qui contient elle-aussi une boucle électronique d’arrière-plan qui ajoute vraiment à cette chanson empreinte de sensualité avec des guitares croustillantes. Mais c’est surtout le texte qui interpelle, qui touche et où Mike confesse avec intensité et émotion : « J’espère et je prie le Dieu d’amour qui est à mes côtés… J’ai de la morphine pour la douleur et une croix blanche pour la tombe, en attendant que le Dieu de paix me sauve… Je me prépare pour la fin et le temps qu’il reste. J’ai fait mon testament. Par le sang, je reviendrai… Je marche avec le Dieu de la grâce à mes côtés… Si vous voulez la paix, préparez-vous à la guerre. »
Enfin l’album se termine en apothéose avecTomorrow, résumant parfaitement bien l’ensemble de l’album : détermination positive et triomphe de l’esprit indomptable du groupe face aux difficultés de la vie ! Whaou…
Maintient cette pensée Ne la laisse pas filer Mets de côté toute l’énergie négative Reste vrai, reste fort Quoi que tu penses être aujourd’hui Tu peux l’être demain
N’abandonne pas le combat Ne pas tout donner Ne pas reculer Vivre pour un autre jour Reste libre, reste en vie !
Garde cette pensée Il est temps de la libérer Libérer tout ce qui est énergie positive
Alors que le 71èmeFestival de Cannes vient de s’achever avec l’annonce du palmarès par le jury présidé par Cate Blanchett décernant la palme d’or au Japonais Hirokazu Kore-Eda et son film « Une affaire de famille », revenons plus largement sur cette quinzaine cinématographique. Occasion de l’aborder sous le prisme d’une réelle présence chrétienne en son sein mais aussi sous la forme de nombreuses thématiques visibles dans les courts et longs métrages.
Le Festival de Cannes s’est déroulé du 8 au 19 mai. Premier événement culturel au monde, chaque année, au mois de mai, il s’empare de la ville et des tabloïds du monde entier. Professionnels de l’industrie cinématographique, stars internationales et acteurs en devenir se mêlent à la foule avide d’images, de selfies, d’autographes et de rencontres surprenantes. Le Festival, c’est aussi les paillettes, les stars, les bruits de couloirs mais aussi des scandales et même parfois des affaires diplomatiques… Grands événements ou petites anecdotes prennent parfois des dimensions démesurées, certains faits même ont bâti sa légende. Mais paradoxalement, c’est aussi un lieu où se côtoient des chrétiens du monde entier et où peuvent être portés des thématiques évangéliques au cœur même de bon nombre de films.
Des chrétiens à Cannes
Par sa taille, avec 120 pays accueillis et plus de 12.000 participants, le Festival de Cannes est à l’image de la société dans sa diversité. Et ainsi, nombreux sont les chrétiens présents : Professionnels du cinéma venant présenter des films dans les différentes sélections ou cherchant à les commercialiser grâce au Marché du film, exposants dans ce même Marché, journalistes, bloggeurs, techniciens, exploitants ou simples cinéphiles. Difficile à quantifier évidemment mais les échanges, rencontres programmées ou impromptues sont nombreux et deviennent, parfois même, de vrais rendez-vous divins.
Cette présence chrétienne devient aussi à fortiori plus visible au-travers du Jury œcuménique invité officiellement depuis 1974 pour remettre un prix et d’éventuelles mentions à des films de la sélection officielle, en portant un regard différent distinguant des œuvres de qualité artistique qui sont des témoignages sur ce que le cinéma peut nous révéler de la profondeur de l’homme et de la dimension spirituelle de notre existence. Ce jury international est composé de chrétiens catholiques, protestants, évangéliques ou orthodoxes engagés dans le monde du cinéma (journalistes, réalisateurs, enseignants, théologiens). Toujours plusieurs centaines d’invités, médias du monde entier présents lors de la remise dans le Palais des Festivals. Un palmarès depuis 1974 qui se suffit à lui-même pour démontrer le travail effectué chaque année laissant un témoignage qualitatif remarquable.
Des films qui font souvent écho à la foi
Une tendance apparait ces dernières années à Cannes avec une évolution certaine d’une sélection davantage orientée vers un cinéma d’auteur international audacieux et provocateur, et très souvent pétri d’une dimension sociale, spirituelle et métaphorique avec une volonté d’ouverture aux maux du monde.
Ce fut très clairement le cas cette année avec une bonne moitié de la compétition officielle dans cette perspective. Le Jury œcuménique avait donc le choix et a finalement remis son prix au bouleversant Capharnaüm de Nadine Labaki (récompensé aussi au Palmarès par le Prix du Jury) relevant qu’à travers l’histoire de Zain, un garçon de 12 ans qui attaque ses parents en justice pour lui avoir donné la vie, la réalisatrice expose sans concession l’enfance maltraitée et propose un voyage initiatique empreint d’altruisme. Un film qui aborde aussi la question des migrants et des sans-papiers. Ce même Jury a offert également une mention spéciale à l’excellent Blackkklansman de Spike Lee (auréolé lui aussi du Grand Prix lors du Palmarès final), cri d’alarme contre un racisme persistant et dénonciation par là-même d’une possible appropriation perverse de la religion pour justifier la haine.
Mais, dans cet angle mettant en lien cinéma et valeurs évangéliques, on pourrait en citer beaucoup comme la Palme d’or attribuée au Japonais Hirokazu Kore-eda, Une affaire de famille qui pose notamment la question de savoir quels sont les liens qui unissent, qui construisent plus particulièrement la cellule familiale. Je pense aussi à Lazzaro Felice d’Alice Rohrwacher, s’offrant une véritable métaphore christique dans un film qui dénonce toutes les formes d’esclavages modernes et de manipulation qui gangrènent le cœur humain. Il y avait cette petite perle, Yomeddine, une sorte de road-movie égyptien conduisant un lépreux à partir à la recherche de ses origines et de son père en particulier, soutenu par un jeune orphelin qui l’accompagne. Et encore l’amour qui surpasse toutes les entraves du monde, du pouvoir politique et des frontières dans le film polonais Cold War qui se termine avec tristesse et beauté sur cette phrase « Allons de l’autre côté… la vue y est plus belle ».
Ce fut aussi le combat social avec En guerre et un immense Vincent Lindon, la soif de liberté dans le film iranien de Jafar Panahi Trois visages ou encore un oppressant mais touchant Ayka sur les possibles souffrances de la maternité qui a valu le prix d’interprétation féminine à sa jeune héroïne Samal Yeslyamova qui jouait là dans son premier film.
Le choix de l’authenticité
Comment ne pas évoquer aussi cette importance de l’authenticité qui ressort dans plusieurs métrages ? Des cinéastes qui recherchent et privilégient l’expression vraie et sincère de personnages jouant leur propre rôle ou, du moins, une histoire proche de leur existence, plutôt que de miser parfois sur des acteurs confirmés. Et cela fonctionne, en tout cas dans plusieurs de ces films évoqués comme Capharnaüm, En guerre ouYomeddine. Les deux acteurs récompensés pour les prix d’interprétations masculine et féminine en sont aussi témoins car la justesse de leur prestation en est la force. Marcello Fonte dans Dogman est éblouissant dans ce rôle de toiletteur canin discret et apprécié de tous qui face à la trahison et l’abandon, voit sa vie totalement basculer. Quant à Samal Yeslyamova, dans Ayka, comme je le disais précédemment, elle crève littéralement l’écran et nous prend aux tripes dans sa capacité à projeter sa souffrance physique et psychologique. Un film qui, par ailleurs, trouve de la grandeur et de la dignité dans un refus de l’enjolivement et du romanesque en prenant le risque de mettre le spectateur, avec brutalité, à l’épreuve de la laideur du monde et de la souffrance des démunis.
Voilà c’est fini…
Edouard Baer, MC de la soirée de clôture l’a plutôt bien dit : « Le festival rentre chez lui c’est-à-dire chez nous, on rentre à la maison, après ce monde d’illusions, de rêves, de colères pour rien, de violence parfois sincères et authentiques. Le Festival de Cannes remballe, ses hommes, ses femmes, qui étaient là tous ensemble, unis, pour rien. Pour rêver, pour construire, pour essayer de dire que derrière les films, derrière les images, derrière les sons, il y a des rêves, il y a des violences, des envies de transmettre, des choses. Nous sommes simplement des gens qui ont eu le courage ou la chance d’exprimer nos rêves, d’aller vers les autres, de tendre une main qu’on appelle un film. Nous sommes des hommes et femmes ici, privilégies sans doute, mais qui sauront faire quelque chose de tout ça ».
Savoir faire quelque chose de tout ça… c’est peut-être finalement ça aussi qui devient comme une responsabilité individuelle et collective pour les spectateurs qui, dans les mois qui viennent, seront ceux qui accueilleront toutes ces images, tous ces sons, tous ces personnages et toutes ces histoires. Je vous souhaite donc maintenant d’en faire bon usage et que votre vie soit ainsi divertie et sans nul doute enrichie. Et vivement mai 2019 pour que le rideau s’ouvre à nouveau et les marches se draper de rouge pour un nouveau Festival… pas comme les autres.
The place, Billie, Drunk, Michel-Ange… Toute l’actualité ciné avec Jean-Luc Gadreau, journaliste et blogueur.
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NOUVEAU ! « Je confine en paraboles »
Chaque jour à 7h45 , pendant ce temps de confinement, je vous propose ma minute-vidéo « Je confine en parabole »… histoire de bien démarrer la journée.
Que celui qui a des oreilles…