
Un pêcheur qui pêchait… au carrelet de pied
Retour en vidéos et photos sur un merveilleux moment de pêche, cet été, comme je les aime, au « carrelet de pied » aux Boucholeurs en Charente-Maritime, au cœur des magnifiques parcs ostréicoles, et avec un paysage extraordinaire tout autour de moi (les îles de Ré, Aix, Oléron… Châtelaillon… La Rochelle…).
Je dois être l’un des rare encore à la pratiquer dans la région. Pas vu d’autre pêcheurs l’utiliser depuis plusieurs années… Une pêche traditionnelle et extrêmement sportive, hélas délaissée. Le carrelet continue de servir comme engin de pêche dans le marais ou monté sur les pontons en bordure d’océan ou d’estuaire.
Merci à ma fidèle accompagnatrice Nadiège, qui devient « journaliste reporter » pour l’occasion… qui lâchera un « oh la vache » mémorable (non ce ne sont pas des vaches Nadiège !!!)… et qui finira par m’aider à porter le sac de poison vers la fin du périple… Car oui, j’allais oublier… ce jour-là j’ai ramené 17 mulets (je n’ai gardé que les gros pour manger en délicieux filets et une soupe particulièrement bonne, et faire profiter les amis) et le poids total était plutôt « conséquent ».
Je profite de cet article pour vous partager également quelques lignes extraites de mon livre « Malléable… pour tout recommencer » (© 2011 : Les productions L7) encore disponible en librairie ou en me le commandant directement. J’y parle justement de mon amour pour cette pêche si particulière :
« … Je crois profondément qu’apprendre à découvrir la présence du divin dans une simple fleur, dans le regard d’un animal ou le souffle d’une brise légère nous permet d’entrer dans une communion particulière avec l’Esprit de Dieu et développe en nous un cœur d’adorateur. Très jeune encore, sur la côte atlantique charentaise, au port des Boucholeurs (sur la commune d’Yves, à côté de Châtelaillon et proche de La Rochelle), j’ai appris, avec mon père, la pêche au carrelet de pied. Une technique ancienne, où le pêcheur part à marée basse rejoindre la mer. Il l’accompagne à la marée montante en pêchant au moyen d’un filet d’environ deux mètres de côté monté sur une perche droite de trois mètres avec un pied en sabot. Ce pied servant d’appui au pêcheur. Au sommet de la perche se trouve un anneau auquel est fixé la corde de relevage. À chaque fois que l’occasion m’est donnée et que le temps le permet en été, je retrouve ces sensations uniques. Après une marche d’une vingtaine de minutes sur le sable et la vase, carrelet sur l’épaule, sac à poissons autour du cou, je retrouve l’océan parti se reposer au large le temps d’une courte pause. Se retrouver là, seul ou avec ceux qui je partage ce plaisir, au milieu des parcs à huîtres attendant le courant prêt à déferler à nouveau, à la vitesse – dit-on avec une pointe d’exagération – d’un cheval au galop, jusqu’à la plage, la longue jetée et le petit port ostréicole. Je respire, j’oublie tout, je prie, je remercie et je sens monter en moins ce bonheur intense qui ne s’explique pas, qui ne se traduit pas autrement que par les émotions de l’instant. J’observe, j’écoute le moindre craquement dans les pierres provoqué par un petit crabe batailleur plein d’énergie ou la brusque réaction effrayée d’une anguille dans les flaques oubliées du descendant… Puis soudain, le filet commence à se recouvrir d’eau, et les premiers remous apparaissent au loin, puis un premier meuil (nom charentais du mulet) saute… et un autre encore… tels de mini-dauphins heureux d’être emportés par le courant et profitant par la même occasion des rayons de soleil brûlant sur l’océan affamé qui semble engloutir la vase, les parcs à huîtres et l’ensemble de cette faune attendant son retour. Il est temps de s’y mettre… Je guette et m’apprête à relever le carrelet. Concentré je prends la corde à pleines mains, je bloque le sabot du pied gauche et d’un geste ferme je tire, me jetant brusquement en arrière. Et là, formidables secousses… les meuils sont bel et bien là, bondissants pour s’échapper, trouver l’ouverture, la maille cassée par la coupure éventuelle d’une coquille d’huître. Une fois saisis et rangés fébrilement dans le sac accroché à l’épaule, je repose le filet sur la vase attendant la prochaine occasion. Je peux continuer à admirer ce paysage digne du plus beau chef-d’œuvre d’un sublime artiste. À ma droite au large, les historiques tours de La Rochelle et le pont de l’île de Ré. Juste en face, avec cette impression de pouvoir presque l’atteindre en prolongeant légèrement la marche, l’île d’Aix, petite et majestueuse à la fois, l’impératrice8 du pertuis d’Antioche. Légèrement à gauche les redoutables fort Énet et fort Boyard, bastions du même pertuis, laissant apparaitre dans l’horizon la splendide côte Oléronnaise. Enfin plus à gauche encore, la longiligne découpe de la presqu’île de Fouras avec l’impressionnante baie d’Yves sur son devant. Je savoure chaque seconde de ce bonheur intérieur et si puissant à la fois… Dieu est là avec moi et je partage avec lui sa présence ! … »